L'importance de l'écoute en thérapie :
L’histoire de Valérie et Océane
L’importance de l’écoute en thérapie, l’histoire de Valérie et Océane. Exercer en tant que psy-coach pendant plus de 30 ans m’a appris une leçon cruciale : chaque patient est unique. Par conséquent, chaque thérapie doit être adaptée à cette singularité. L’écoute active est donc un élément clé du processus thérapeutique. Je vais vous partager une expérience vécue qui illustre parfaitement cette vérité.
Valérie et Océane : un cas complexe
Valérie est venue me consulter avec sa fille de cinq ans, Océane. C’était leur dernier recours. Elles avaient déjà rencontré la psychologue de l’école à plusieurs reprises, puis une pédopsychiatre, sans aucun résultat concluant. Le problème, selon Valérie, était qu’Océane refusait catégoriquement de colorier un exercice donné par sa maîtresse. Cet exercice consistait à colorier une image de Kirikou partageant une galette des rois avec ses amis.
Ce refus de colorier a engendré une série de punitions pour Océane. La maîtresse l’avait privée de récréation à plusieurs reprises, espérant ainsi la faire obtempérer. Les parents, de leur côté, avaient tout essayé pour encourager Océane à réaliser son devoir, mais en vain. À ce stade, Valérie était désemparée. En tant que thérapeute, il était de mon devoir de comprendre la source de ce refus obstiné.
Première consultation
Lors de notre première rencontre, Valérie était visiblement frustrée. Elle m’expliqua en détail toutes les punitions que ce simple refus de colorier avait entraînées pour Océane. Pendant qu’elle parlait, j’observais Océane, qui restait silencieuse, concentrée sur son dessin. J’avais mis à sa disposition du papier et des crayons, car je savais qu’elle aimait dessiner. Valérie, quant à elle, m’a apporté le classeur d’Océane, qui servait de cahier du jour à l’école. En le feuilletant, j’ai été horrifiée par ce que j’y ai trouvé.
Une méthode d’évaluation discutable
Les exercices d’Océane étaient notés non pas par des chiffres ou des lettres, mais par des émoticônes : un sourire pour indiquer un bon travail et une bouche tournée vers le bas, en rouge, pour signaler un échec. Cette méthode de notation me semblait non seulement inappropriée pour une enfant de cinq ans, mais aussi potentiellement traumatisante.
En examinant les pages, je constatais qu’Océane ne semblait pas avoir de difficultés particulières dans ses autres exercices. Elle était capable de réaliser les tâches demandées, mais son refus de colorier la galette des rois persistait. Tout en discutant avec Valérie, je continuais d’observer Océane, silencieuse mais visiblement absorbée par son dessin. C’est alors que j’ai décidé de proposer une solution différente, quelque chose qui, à mon avis, pourrait débloquer la situation.
Une approche créative pour résoudre le problème
J’ai demandé à Valérie d’une voix ferme : « Voici ce que vous allez faire. Quand vous sortirez de chez moi, vous irez dans le supermarché au coin de la rue. Vous achèterez un kilo de farine, des œufs, de la levure, et du chocolat. Puis, vous rentrerez chez vous et vous ferez un gâteau au chocolat avec Océane. Vous y mettrez une fève, comme si c’était la galette des rois. »
À cet instant précis, Océane leva la tête pour la première fois depuis le début de la séance. Elle se tourna vers sa mère et lui demanda avec enthousiasme : « Mais on a le droit de faire un gâteau au chocolat avec une fève ? Dis maman, on a le droit ? »
Cette simple question contenait tant de significations. Valérie, un peu surprise par la réaction de sa fille, répondit immédiatement : « Oui, bien sûr ! »
Océane, visiblement soulagée, murmura : « Ben moi, j’aime pas la galette. » Ce simple aveu révélait enfin la source de son refus obstiné. J’ai alors demandé à Océane si elle voulait bien colorier la galette sur son devoir, sachant qu’elle n’avait plus à craindre d’en manger. Sans hésitation, elle s’exécuta.
Une découverte inattendue
J’ai appris plus tard que la cantine scolaire avait, en parallèle, forcé Océane à manger de la galette des rois. Cette pression avait créé en elle une aversion non seulement pour la galette, mais aussi pour tout ce qui s’y rapportait, y compris le simple fait de la colorier. Ce refus de colorier la galette n’était pas un caprice, mais une manifestation d’une blessure plus profonde.
Valérie a tenu sa promesse en sortant de la consultation. Elle et Océane ont préparé ensemble un gâteau au chocolat avec une fève, pour le plus grand bonheur de toute la famille. Cette expérience a non seulement permis de résoudre un problème qui semblait insurmontable, mais elle a également renforcé le lien entre Valérie et Océane.
Conclusion
Cette histoire m’a profondément marquée. Elle m’a rappelé une vérité essentielle : en thérapie, il est crucial d’écouter attentivement et de considérer chaque patient comme un individu unique. Personne n’avait pris le temps de demander à Océane pourquoi elle ne voulait pas colorier la galette des rois. En prenant le temps d’écouter, d’observer, et d’adopter une approche créative, j’ai pu découvrir la source de son malaise et aider cette petite fille à surmonter sa peur.
En tant que thérapeute, il est facile de tomber dans le piège des solutions toutes faites. Mais cette histoire prouve que la clé du succès réside souvent dans l’écoute active, la patience, et une approche personnalisée. Chaque patient est un univers à part entière, et chaque thérapie doit être taillée sur mesure pour correspondre à ses besoins spécifiques.